mardi 15 juin 2010

Allo? Allo!

Quand j'étais jeune et innocent - ou disons plutôt naïf et franchement crétin, j'avais quand même assez de lucidité pour réaliser que les meetings servent rarement à quelque chose. Heureusement pour moi, il reste toujours un peu de marge pour apprendre: c'est ainsi que j'ai découvert que si l'on veut vraiment pourrir la journée de quelqu'un, il suffit de le convoquer pour une conférence téléphonique. Meeting + haut-parleur qui grésille = mort.

Bon, j'ai déjà assisté à plein de ces appels, mais j'étais de fait toujours du côté de l'organisateur, ou en tout cas dans la même pièce que celui avec le plus gros salaire: en face de moi l'action, au bout du fil les masses prolétariennes censées extraire leur ordre de marche des conversations se déroulant sous mes yeux.

Me voici désormais du côté des masses prolétariennes, avec au bout du fil le QG bien-aimé et son équipage au complet (Christine Boutin, le Caniche, Willy, et plusieurs autres), et quelques autres répartis eux aussi sur le globe. Première intervention par un gars qui, lui, est carrément sur le point de prendre l'avion. C'est rigolo, parce que si dans les aéroports on a toujours l'impression que les annonces sont hachées et incompréhensibles, là je peux vous dire qu'on recevait la notice d'embarquement cinq sur cinq. Ce que le mec a dit, par contre, aucune idée.

Puis viennent d'autres interventions tout aussi inutiles - un mélange de borborygmes et d'ellipses qui te font comprendre que la présentatrice n'a rien branlé, mais qu'elle tâchera de moins bosser avec encore plus de panache la semaine prochaine sur un sujet dont de toute façon tout le monde se fout. Puis vient finalement le moment important: décider des conditions de notre sortie de team-building. Où qu'on devrait s'éclater la panse aux frais de la Princesse, les amis? Parce qu'il faut s'amuser autant que réfléchir, nous dit-on, hein, c'est important.

Un clone de Steve Buscemi nous entretient d'abord d'une supernouvellegéniale méthode de brainstorming qu'il a essayée la semaine dernière au Caire. "Takes the storm away from the brain". Putain respect pour la formule, Steve, on est tous avec toi. Puis vient la discussion -la seule qui compte- du lieu: il nous avait été demandé de proposer une destination - pourquoi pas le Cap Vert, avais-je dit? On peut plonger, surfer, il fait beau, c'est accessible pour Deng Xiaoping qui ne peut pas trop voyager. Et, de fait, j'étais le seul à avoir apparemment répondu à l'appel à propositions formulé la dernière fois. C'était trop beau, c'était tout cuit.

Et évidemment, c'était trop beau (et pas cuit du tout). Steve Buscemi commence d'emblée à demander s'il y a des aéroports accessibles (non Steve, le Cap-Vert est perdu dans l'Atlantique, on se ravitaille encore en pirogue); et le Caniche d'embrayer tout de suite en disant qu'elle a une meilleure idée, qu'en fait ce serait bien si on pouvait tous se retrouver au QG. Je n'ai pas souvenir que la proposition ait été soumise au vote, mais voilà, on va tous se taper un jour de brainstorming dans le vaisseau-mère (et donc une journée de vol aller, une au retour, c'est Deng et son dos en purée qui va être content) plutôt que trois jours à Sal ou Praia. Adieu veau, vache, cochon, surf. Bonjour vaseline.

Elle n'aurait pas simplement pu dire qu'elle n'avait pas le budget, cette conne, plutôt que de nous prendre pour des abrutis?

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