samedi 19 juin 2010

Toutes des salopes

Vous êtes occidental, gros et vieux? Bien! Vous avez toutes vos chances dans les meilleures boîtes de Dakar. Trop y croire nuit cependant gravement à la santé. Explication:

Hier soir un collègue décide de m'emmener voir "le vrai Dakar by night". Départ après minuit, heure où bibi dort normalement du sommeil du juste, direction le centre-ville. Il connaît la nuit, il a ses entrées, je le suis à la trace comme un gentil toutou - ce qui me vaut d'ailleurs une remarque de la première sénégalaise qui m'adresse la parole après à peine trois minutes sur place: "Pourquoi tu le suis comme ça? il est noir!" Ben oui, il est noir mais il connaît tout le monde, et toi aussi cocotte il te connaît. Pas touche.

Hors doncques, nous commençons à discuter avec un des grands patrons de la nuit locale. Français bien sûr, vieux évidemment, adore l'Afrique parce que, entre autres, "on est plus libres qu'en France" qu'il a quittée il y quinze ou vingt ans. Les trois-quarts des établissements qu'il a ouverts ont des licences bidons: il arrose et ne s'en cache pas. Mais sympa et, c'est là le paradoxe, apparemment heureux en ménage depuis ses toutes jeunes années: sa femme a même réduit la superficie d'un de ses troquets pour pouvoir ouvrir son propre commerce de fruits et légumes. En attendant, pour remplir ses commerces à lui, 50% des filles sont des putes. Au début je pensais juste à des entraîneuses (genre "tu m'offres un verre au triple du prix normal, chéri?"), mais non non, on me confirme: ce sont bien des putes (même si elles cherchent avant tout un mari pour les sortir de là). Bon.

Et puis vient Thibaut, un de ses gérants. Une tête de truand honnête - ce n'est pas un oxymore, juste l'impression qu'il dégage. Pas compliqué, ouvert, on sympathise tout de suite et là il commence à me déballer ce qu'il a vu en dix ans de Sénégal. Je ne veux pas lui faire perdre la fraîcheur de ses histoires si jamais il publie un livre (si je le revois je lui en reparle), mais voici la trame générale, drôle et triste à la fois.

Monsieur le Français a un bon poste. Médecin, homme d'affaires. Il vient à Dakar pour un congrès, une mutation. Solide, intelligent, bien établi (femme, enfants, toussa). Il passe une nuit en boîte pour se détendre. Chope une locale, et nique comme un fou pendant un, deux jours. Perd la tête. Décide de se marier avec ladite locale (apparemment c'est arrivé à un cadre de Sofitel - au bout de 15 jours), ou en tout cas de s'installer ici pour de bon (lâchant boulot et famille au passage). Il monte une affaire et vit heureux comme un pape.

Puis viennent les dures réalités du business à la sénégalaise: il faut arroser les douanes, la police, les impôts (Thibaut appelle ça la redistribution de la richesse). Sa femme, fine connaisseuse de la culture locale, lui dit: "c'est parce que tu es blanc, ils savent qu'ils peuvent t'emmerder comme ils veulent". Malin, notre businessman blanc décide de tout mettre au nom de Madame qui, si vous avez suivi, est noire.

24h plus tard les frères et/ou l'amant débarquent, et le mec est jeté à la rue propre en ordre. Adieu veau vache cochon couvée femme et business. L'ambassade doit alors les rapatrier (généralement vers l'hopital, vu qu'ils ont aussi chopé une intoxication ou maladie quelconque). Thibaut m'a raconté trois ou quatre histoires à la suite, les trois ou quatre suivent le même principe. Seule la profession initiale du gars change. Selon mon conteur du soir c'est le cas (ou la conclusion) de 95% des mariages mixtes qu'il a vus.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Le peintre !